Teilo Daroux
3ᵉ année, Délégué, Lug
"Oh, ils sont en haut.. haut-oh. Ho ho hooo."
Tandis que Lorie montait l'escalier, la voix d'Olivier Daroux montait dans les aigüs, ce qui fit sourire Fabrice. Suzanne, elle, avait la mâchoire crispée.
"Papa, arrête."
"Pardon, ma petite Suzanne. C'est la gênance ?"
"Oui, c'est la... alors non, là, non. T'es vieux, arrête d'utiliser des mots de jeune, ça te va pas du tout."
"Oh... d'accord."
Olivier sourit à la tablée, s'assit à sa place et tapota son assiette de son index. Puis il se pencha vers sa fille : "Entre nous... tu crois qu'ils kiffent la vibe ?" "Mais STOP làààà. Juste... stop." "D'accord, d'accord." Tous les autres Daroux se mirent alors à sourire. Même Armelle, qui s'était déplacée vers la fenêtre pour voir le grand final du feu d'artifice, ne put s'empêcher de pouffer doucement. Robin agitait ses jambes sous sa chaise et jouait avec sa fourchette. "Euh... on est obligés de les attendre ? Aïe !" Ariane venait de lui mettre un coup de coude à l'épaule et les deux plus petits se défièrent du regard. "Oui, mon chéri, on les attend". Armelle revenait vers la table pour récupérer les deux plateaux de coquilles Saint-Jacques. "Je vais les remettre au four, c'est bien meilleur chaud."
Après un grand sourire à sa femme, Olivier rajusta une nouvelle fois sa cravate de Noël puis tapa de sa main sur la table avec enthousiasme. "Dites donc, je me suis toujours demandé comment on fabriquait les feux d'artifice ! Vous pouvez nous expliquer, Mademoiselle Fleury ? Ceux qui sont dans l'ignorance comme moi pourraient penser qu'il y a là quelque-chose de magique."
Toutes les figures attablées se tournèrent alors vers Elina. Fabrice, assis à côté d'elle, l'encouragea d'un mouvement de tête.
La question de Pensée tournait dans la tête de Teilo. « Pourquoi ferais-je de mauvais rêves ? » C'était bizarre, comme question. Tout le monde faisait des mauvais rêves, non ? Il en faisait bien, lui, surtout depuis qu'il n'avait plus Totoro. Et Pensée, elle avait du aussi en faire plein quand elle était à l'hopîtal. Mais si elle lui demandait ça, ça voulait peut-être dire qu'elle ne s'en rappelait plus. Alors tant mieux.
Dans le ciel, c'était le bouquet final, multicolore, assourdissant et lumineux. Un poids s'était doucement posé sur son épaule. C'était rien, juste une tête. C'était la tête de Pensée, sa joue chaude sur son épaule gauche. Dans sa poitrine, son petit coeur se mit à battre au rythme irrégulier des explosions d'artifice. Il inspira et expira doucement. Une belle fleur rouge dans le ciel colora son visage, comme elle avait coloré celui de Pensée ce jour de Noël 2022, sur les remparts. Ce jour là.
Il avait envie de lui dire un truc, là, tout de suite mais... mais il était plus petit qu'elle, elle allait sûrement se faire mal au cou à pencher sa tête comme ça ! Et c'était déjà trop tard. Le feu d'artifice était terminé et le ciel redevenait noir. Avec les lumières artificielles de la ville, hors de question d'observer la moindre étoile. Teilo le savait. C'était bien pour ça qu'il en avait mis partout dans sa maison.
On frappa à la porte de la chambre d'Olympia. Sûrement Maman, se dit Teilo. Mais c'était Lorie qui les invitait à redescendre. Dommage, ils étaient bien en haut. Souriant à Pensée, il la laissa filer. Ce soir, tout allait vraiment trop vite. Après quelques secondes d'hésitation, il voulut la suivre mais quelque chose l'en empêcha. C'était Lorie qui avait refermé la porte et se rapprochait lentement de lui. Le Lug cligna des yeux, puis sourit à la Championne de Beauxbâtons. Quand elle fit mine de mesurer la hauteur de sa tête avec sa main, il pouffa. Sûr, il avait grandi, enfin... façon de parler. "C'est vrai qu'avec les bois de renne, j'ai pris au moins vingt centimètres", annonça-t-il fièrement.
En vrai, il n'avait pris que trois centimètres et demi depuis septembre. Il le savait parce qu'il vérifiait régulièrement sa taille et la notait au marqueur sur un mur de sa chambre.
Lorie lui annonça vouloir discuter, ce qui le fit sourire de plus belle. Enfin, il allait pouvoir lui poser toutes les questions qu'il voulait sur Castelobruxo et lui raconter ses propres aventures à Beauxbâtons depuis Octobre. Mais quand il vit l'objet qu'elle venait de sortir de sa poche, son sourire se figea. Il déglutit.
"Ah... ça..." commença-t-il en se balançant d'un pied à l'autre. Mécaniquement, sa main droite vint gratter sa nuque et il tourna la tête vers la fenêtre encore ouverte, derrière laquelle tombaient toujours de beaux flocons blancs. C'était lui où il faisait vraiment froid, en fait ? Bon, il ne pouvait quand même pas mentir, pas à Lorie. "Je voulais juste qu'il neige pour Noël", lui avoua-t-il avec un sourire embarassé. "Suzanne m'aurait dit non. Alors on a pris un risque calculé."
Il aurait bien voulu rajouter qu'il n'y avait aucun mal à ça, que c'était juste un emprunt temporaire de toute façon et que ce n'était pas pire que quand Suzanne faisait pleuvoir, mais quelque-chose lui disait que Lorie ne l'aurait pas bien pris. Il préféra donc lui dire une autre vérité en arondissant ses yeux : "Toi, t'en prends tout le temps des risques."
Tandis que Lorie montait l'escalier, la voix d'Olivier Daroux montait dans les aigüs, ce qui fit sourire Fabrice. Suzanne, elle, avait la mâchoire crispée.
"Papa, arrête."
"Pardon, ma petite Suzanne. C'est la gênance ?"
"Oui, c'est la... alors non, là, non. T'es vieux, arrête d'utiliser des mots de jeune, ça te va pas du tout."
"Oh... d'accord."
Olivier sourit à la tablée, s'assit à sa place et tapota son assiette de son index. Puis il se pencha vers sa fille : "Entre nous... tu crois qu'ils kiffent la vibe ?" "Mais STOP làààà. Juste... stop." "D'accord, d'accord." Tous les autres Daroux se mirent alors à sourire. Même Armelle, qui s'était déplacée vers la fenêtre pour voir le grand final du feu d'artifice, ne put s'empêcher de pouffer doucement. Robin agitait ses jambes sous sa chaise et jouait avec sa fourchette. "Euh... on est obligés de les attendre ? Aïe !" Ariane venait de lui mettre un coup de coude à l'épaule et les deux plus petits se défièrent du regard. "Oui, mon chéri, on les attend". Armelle revenait vers la table pour récupérer les deux plateaux de coquilles Saint-Jacques. "Je vais les remettre au four, c'est bien meilleur chaud."
Après un grand sourire à sa femme, Olivier rajusta une nouvelle fois sa cravate de Noël puis tapa de sa main sur la table avec enthousiasme. "Dites donc, je me suis toujours demandé comment on fabriquait les feux d'artifice ! Vous pouvez nous expliquer, Mademoiselle Fleury ? Ceux qui sont dans l'ignorance comme moi pourraient penser qu'il y a là quelque-chose de magique."
Toutes les figures attablées se tournèrent alors vers Elina. Fabrice, assis à côté d'elle, l'encouragea d'un mouvement de tête.
* * *
La question de Pensée tournait dans la tête de Teilo. « Pourquoi ferais-je de mauvais rêves ? » C'était bizarre, comme question. Tout le monde faisait des mauvais rêves, non ? Il en faisait bien, lui, surtout depuis qu'il n'avait plus Totoro. Et Pensée, elle avait du aussi en faire plein quand elle était à l'hopîtal. Mais si elle lui demandait ça, ça voulait peut-être dire qu'elle ne s'en rappelait plus. Alors tant mieux.
Dans le ciel, c'était le bouquet final, multicolore, assourdissant et lumineux. Un poids s'était doucement posé sur son épaule. C'était rien, juste une tête. C'était la tête de Pensée, sa joue chaude sur son épaule gauche. Dans sa poitrine, son petit coeur se mit à battre au rythme irrégulier des explosions d'artifice. Il inspira et expira doucement. Une belle fleur rouge dans le ciel colora son visage, comme elle avait coloré celui de Pensée ce jour de Noël 2022, sur les remparts. Ce jour là.
Il avait envie de lui dire un truc, là, tout de suite mais... mais il était plus petit qu'elle, elle allait sûrement se faire mal au cou à pencher sa tête comme ça ! Et c'était déjà trop tard. Le feu d'artifice était terminé et le ciel redevenait noir. Avec les lumières artificielles de la ville, hors de question d'observer la moindre étoile. Teilo le savait. C'était bien pour ça qu'il en avait mis partout dans sa maison.
On frappa à la porte de la chambre d'Olympia. Sûrement Maman, se dit Teilo. Mais c'était Lorie qui les invitait à redescendre. Dommage, ils étaient bien en haut. Souriant à Pensée, il la laissa filer. Ce soir, tout allait vraiment trop vite. Après quelques secondes d'hésitation, il voulut la suivre mais quelque chose l'en empêcha. C'était Lorie qui avait refermé la porte et se rapprochait lentement de lui. Le Lug cligna des yeux, puis sourit à la Championne de Beauxbâtons. Quand elle fit mine de mesurer la hauteur de sa tête avec sa main, il pouffa. Sûr, il avait grandi, enfin... façon de parler. "C'est vrai qu'avec les bois de renne, j'ai pris au moins vingt centimètres", annonça-t-il fièrement.
En vrai, il n'avait pris que trois centimètres et demi depuis septembre. Il le savait parce qu'il vérifiait régulièrement sa taille et la notait au marqueur sur un mur de sa chambre.
Lorie lui annonça vouloir discuter, ce qui le fit sourire de plus belle. Enfin, il allait pouvoir lui poser toutes les questions qu'il voulait sur Castelobruxo et lui raconter ses propres aventures à Beauxbâtons depuis Octobre. Mais quand il vit l'objet qu'elle venait de sortir de sa poche, son sourire se figea. Il déglutit.
"Ah... ça..." commença-t-il en se balançant d'un pied à l'autre. Mécaniquement, sa main droite vint gratter sa nuque et il tourna la tête vers la fenêtre encore ouverte, derrière laquelle tombaient toujours de beaux flocons blancs. C'était lui où il faisait vraiment froid, en fait ? Bon, il ne pouvait quand même pas mentir, pas à Lorie. "Je voulais juste qu'il neige pour Noël", lui avoua-t-il avec un sourire embarassé. "Suzanne m'aurait dit non. Alors on a pris un risque calculé."
Il aurait bien voulu rajouter qu'il n'y avait aucun mal à ça, que c'était juste un emprunt temporaire de toute façon et que ce n'était pas pire que quand Suzanne faisait pleuvoir, mais quelque-chose lui disait que Lorie ne l'aurait pas bien pris. Il préféra donc lui dire une autre vérité en arondissant ses yeux : "Toi, t'en prends tout le temps des risques."
- Occlumencie:
- Tout ce que dit Teilo est vrai.
Lorie Fleury
6ᵉ année, Déléguée, Ogme
L’adolescente soupira et se déplaça jusqu’au lit le plus proche pour s’y asseoir. Loin de se douter qu’au même moment, quelques étages plus bas, sa sœur était en train d’expliquer de façon précise la fabrication de feu d’artifice, la mage blanc de son côté mettait ses idées en ordre. D’un petit tapotement de main sur les draps, elle invita Teilo à s’asseoir lui aussi à côté d’elle. Elle comprenait pourquoi il avait agi ainsi, le plus délicat pour Lorie était la dernière phrase qu’il avait envoyée à son attention.
« Comment tu te serais senti si d’un seul coup ta pierre d’océanide disparaissait ? Pour apprendre quelques heures plus tard que c’était en réalité quelqu’un en qui tu avais confiance qui l’avait prise sans ton autorisation ? » Le regard océan de Lorie sonda le jeune Daroux. Elle n’attendait pas spécialement de réponse, il voulait juste qu’il prenne conscience de la sensation désagréable qu’il avait engendrée chez sa sœur. « Concernant les risques que je prends… Lorie laissa un petit rire amusé s’échapper avant de s’appuyer sur ses bras. Je ne peux pas te donner tort, j’ai visiblement une fâcheuse tendance à en prendre, mais je ne sais pas si c’est vraiment un bon exemple et si ça en vaut la peine. » Lorie tourna la tête pour observer Teilo et lui adresser un sourire complice. « Si mon avis à vraiment une importance, j’aimerais que tu te poses deux questions avant de prendre un objet qui ne t’appartient pas à l’avenir : est-ce que cet objet n’est pas piégé et est-ce que le prendre ne ferait pas souffrir quelqu’un. Lorie marqua un silence. Pour le reste, tu es grand, je te laisse gérer. »
Lorie décoiffa la tête de Teilo en rigolant puis se releva pour se mettre debout. Se posta devant lui et tendit sa main pour inviter Teilo à descendre. Au même moment, son ventre se mit à gronder et elle se retint de rire.
« Aller vient Teitei ça va refroidir et… On a quelques trucs un peu moins sérieux à se raconter » fit-elle amusée toujours avec sa voix délicate non sans accompagner ses dires d’un clin d’œil. Sourire aux lèvres elle attendit que le sorcier se mette en mouvement pour descendre avec lui.
Teilo Daroux
3ᵉ année, Délégué, Lug
Sans rechigner, Teilo obéit et s'assit juste à côté de Lorie sur le lit. La tête tournée vers elle, les mains sur les cuisses, il attendit qu'elle lui parle comme elle l'avait fait tant de fois auparavant. Les petites leçons de Maman lui donnaient de l'urticaire maintenant mais toujours pas celles de Lorie.
Oui, elle avait raison. Si on lui avait pris sa pierre des océanides, il n'aurait pas été très content. Sauf que si le voleur avait été une personne de confiance comme Gio ou Pensée, il n'en aurait pas fait tout un foin, lui ! De toute façon, sa pierre était morte. Elle avait finit par perdre entièrement son bel éclat bleu et il n'avait pas eu le coeur encore d'en refaire une. Même éteinte, vidée de toute sa magie, il la conservait précieusement sur lui quand il était à Beauxbâtons, dans une des poches de sa veste, et la manipulait toujours quand il était un peu tendu.
Il comprenait quand même l'idée que Lorie voulait lui partager : oui, la propriété c'était important pour certaines personnes mais quand même, ça aurait été beaucoup plus simple si sa soeur était plus partageuse et juste... ben, sympa en fait. Mais bon, très bien, il s'excuserait auprès d'elle, il avait juste à trouver comment. Et pour le reste des conseils que Lorie lui donnait, a) s'assurer qu'un objet n'est pas piégé avant de le prendre, b) s'assurer aussi que sa disparition ne fera souffrir personne, il se jura de faire encore plus attention à bien les appliquer. Il fallait vraiment qu'il soit plus prudent. C'était la meilleure manière de prendre des risques.
"Pour le reste, tu es grand, je te laisse gérer."
Teilo fronça les sourcils et laissa la main de Lorie le décoiffer entre ses bois. Il avait envie de lui dire qu'elle lui avait vraiment beaucoup manqué, que parfois, confronté à des choix pendant son absence, il l'avait imaginée à côté de lui en train de le conseiller, comme l'année dernière. Elle ne lui avait jamais dit "Je te laisse gérer" mais là, c'était bien ça qu'il venait bien d'entendre, et de la bouche de la vraie Lorie. Alors il la regarda se lever en clignant des yeux. Le froid de dehors s'infiltrait par la fenêtre, dans les mailles de son pull de Noël et lui glaçait la peau. La musique de Mariah Carey sur la cassette s'était arrêtée. Il avait une boule dans la gorge sans comprendre pourquoi.
Le borborygme du ventre de Lorie divertit son regard et le fit rire en même temps que son amie. La boule dans sa gorge disparut aussitôt, le malaise aussi.
Oui, elle avait raison. C'était Noël et là, ça devenait vraiment trop sérieux. A la base, il voulait l'entendre parler de Castelobruxo ! En se levant, Teilo mit doucement sa main dans celle de la Championne, heureux de pouvoir se laisser guider au moins encore une fois. "Oh, attends, je ferme la fenêtre !" S'il ne le faisait pas, Pensée et Elina auraient froid tout à l'heure. Quatres enjambées, deux mouvements du bras et du poignet plus tard, il était déjà revenu à la main de Lorie, qu'il serra un peu pour attirer son attention : "Je gère Robin."
Ce n'était même pas une question. Il avait hoché une fois la tête pour affirmer son propos. Son petit frère était impliqué dans cette histoire mais c'était son petit frère et Teilo n'allait pas en démordre. Il en était responsable.
Lorsqu'ils parvinrent en bas, son père était en train de poser une question à Elina sur les différents composés chimiques à l'origine des bruits produits par les feux d'artifice. Apparemment, le chlorure de potassium faisait un bruit très fort et quand on entendait le ciel crépiter, c'était grâce au bismuth. Toute la famille Daroux était si concentrée sur la discussion - Suzanne mise à part - qu'ils ne se rendirent compte de leur arrivée qu'au moment où ils prirent place à table, Teilo à côté de Pensée, Lorie à côté de Suzanne, comme le placement des serviettes l'avait prévu.
"Alors ?" demanda Olivier à Teilo.
"Alors quoi ?"
"Alors... on dit pas bonjour à son papa chéri ?"
Teilo sourit et se leva pour déposer un gros smack sur le front de son papa chéri, qui en fut visiblement satisfait. "Je vais chercher les coquilles", signala Armelle en se rendant en cuisine. "En-fin !" Robin, les bras croisés, n'en pouvait plus d'attendre. Quant à Suzanne, elle fixait Lorie avec un petit sourire malin. "Allez Lolo, cette fois tu vas pas y échapper. Raconte ! Le Brésil ! Samba ou pas samba ?" "Quels sports ils font là-bas ?" "Est-ce que tu as découvert de nouvelles formes de magie ?" "Et des créatures ?"
Teilo sourit. Avec tout ce que Lorie devait avoir comme histoires à raconter, et vu l'enthousiasme de ses frères et soeurs, personne n'aurait vraiment le temps de s'impatienter avant d'ouvrir ses cadeaux.
Oui, elle avait raison. Si on lui avait pris sa pierre des océanides, il n'aurait pas été très content. Sauf que si le voleur avait été une personne de confiance comme Gio ou Pensée, il n'en aurait pas fait tout un foin, lui ! De toute façon, sa pierre était morte. Elle avait finit par perdre entièrement son bel éclat bleu et il n'avait pas eu le coeur encore d'en refaire une. Même éteinte, vidée de toute sa magie, il la conservait précieusement sur lui quand il était à Beauxbâtons, dans une des poches de sa veste, et la manipulait toujours quand il était un peu tendu.
Il comprenait quand même l'idée que Lorie voulait lui partager : oui, la propriété c'était important pour certaines personnes mais quand même, ça aurait été beaucoup plus simple si sa soeur était plus partageuse et juste... ben, sympa en fait. Mais bon, très bien, il s'excuserait auprès d'elle, il avait juste à trouver comment. Et pour le reste des conseils que Lorie lui donnait, a) s'assurer qu'un objet n'est pas piégé avant de le prendre, b) s'assurer aussi que sa disparition ne fera souffrir personne, il se jura de faire encore plus attention à bien les appliquer. Il fallait vraiment qu'il soit plus prudent. C'était la meilleure manière de prendre des risques.
"Pour le reste, tu es grand, je te laisse gérer."
Teilo fronça les sourcils et laissa la main de Lorie le décoiffer entre ses bois. Il avait envie de lui dire qu'elle lui avait vraiment beaucoup manqué, que parfois, confronté à des choix pendant son absence, il l'avait imaginée à côté de lui en train de le conseiller, comme l'année dernière. Elle ne lui avait jamais dit "Je te laisse gérer" mais là, c'était bien ça qu'il venait bien d'entendre, et de la bouche de la vraie Lorie. Alors il la regarda se lever en clignant des yeux. Le froid de dehors s'infiltrait par la fenêtre, dans les mailles de son pull de Noël et lui glaçait la peau. La musique de Mariah Carey sur la cassette s'était arrêtée. Il avait une boule dans la gorge sans comprendre pourquoi.
Le borborygme du ventre de Lorie divertit son regard et le fit rire en même temps que son amie. La boule dans sa gorge disparut aussitôt, le malaise aussi.
Oui, elle avait raison. C'était Noël et là, ça devenait vraiment trop sérieux. A la base, il voulait l'entendre parler de Castelobruxo ! En se levant, Teilo mit doucement sa main dans celle de la Championne, heureux de pouvoir se laisser guider au moins encore une fois. "Oh, attends, je ferme la fenêtre !" S'il ne le faisait pas, Pensée et Elina auraient froid tout à l'heure. Quatres enjambées, deux mouvements du bras et du poignet plus tard, il était déjà revenu à la main de Lorie, qu'il serra un peu pour attirer son attention : "Je gère Robin."
Ce n'était même pas une question. Il avait hoché une fois la tête pour affirmer son propos. Son petit frère était impliqué dans cette histoire mais c'était son petit frère et Teilo n'allait pas en démordre. Il en était responsable.
***
Lorsqu'ils parvinrent en bas, son père était en train de poser une question à Elina sur les différents composés chimiques à l'origine des bruits produits par les feux d'artifice. Apparemment, le chlorure de potassium faisait un bruit très fort et quand on entendait le ciel crépiter, c'était grâce au bismuth. Toute la famille Daroux était si concentrée sur la discussion - Suzanne mise à part - qu'ils ne se rendirent compte de leur arrivée qu'au moment où ils prirent place à table, Teilo à côté de Pensée, Lorie à côté de Suzanne, comme le placement des serviettes l'avait prévu.
"Alors ?" demanda Olivier à Teilo.
"Alors quoi ?"
"Alors... on dit pas bonjour à son papa chéri ?"
Teilo sourit et se leva pour déposer un gros smack sur le front de son papa chéri, qui en fut visiblement satisfait. "Je vais chercher les coquilles", signala Armelle en se rendant en cuisine. "En-fin !" Robin, les bras croisés, n'en pouvait plus d'attendre. Quant à Suzanne, elle fixait Lorie avec un petit sourire malin. "Allez Lolo, cette fois tu vas pas y échapper. Raconte ! Le Brésil ! Samba ou pas samba ?" "Quels sports ils font là-bas ?" "Est-ce que tu as découvert de nouvelles formes de magie ?" "Et des créatures ?"
Teilo sourit. Avec tout ce que Lorie devait avoir comme histoires à raconter, et vu l'enthousiasme de ses frères et soeurs, personne n'aurait vraiment le temps de s'impatienter avant d'ouvrir ses cadeaux.
Lorie Fleury
6ᵉ année, Déléguée, Ogme
Lorie regarda Teilo avec les mêmes yeux que lorsqu’elle regardait ses petites sœurs. Silencieuse elle le laissa fermer la fenêtre avant de le voir revenir lui prendre la main. « Évidemment que tu gères » lui répondit-elle avec un petit sourire. Au moins, elle n’aurait pas spécialement à discuter avec.
Une fois en bas, Lorie reprit place à table aux côtés de Suzanne, observant silencieusement les interactions entre toute la famille, mais très vite l’attention fusa sur elle aussi vite qu’une pièce envoyée par un waddiwasi. Elle offrit un sourire à la table avant de se gratter la tête.
« Bon d’accord, je vais tout vous raconter fit-elle amusée. Quand je suis arrivée à la station de Portoloin, je suis tombé sur un sorcier tout à fait adorable, il m’a demandé un autographe pour sa fille et je n’ai pas pu refuser, Lorie ne refusait jamais de signer un autographe. La station était déjà magnifique entre le parquet et les vitraux, mais Castelobruxo… Alors ça ! C’est une tout autre histoire, dès que je suis passée sous la cascade, je suis arrivée dans l’école et c’était… Lorie avait encore des paillettes dans les yeux, elle se souvenait de tout. Indescriptible, les dizaines de chutes d’eau dans la salle qui était comme une cathédrale à ciel ouvert, les arômes des milliers de fleurs, les couleurs les centaines d’arbres reliés par des ponts suspendus. Lorie prit une grande inspiration. Le courant d’eau déchaîné… Je n’ai, je crois, jamais vu aussi belle magie. Confia-t-elle. Puis le professeur Andromeda m’a accueilli, c’est une centaure dont tous les hommes devrait croiser la route tant la sagesse émane d’elle, je crois qu’elle peut lire dans nos cœur, elle m’a guidé jusqu’à une E-NORME porte en or massif qui une fois poussé s’est ouverte sur une salle où trônait fièrement l’idole des tempêtes, un oiseau à trois tête et aux six ailes ! Une merveille d’artisanat magique. Il s’est approché vers moi et m’a sondé. Lorie changea sa voix, Nous discernons l’affliction… Elle marqua un silence, ce passage n’était pas des plus joyeux, mais nous discernons aussi l’aplomb, la volonté et l’amour… LORIE-AU-CŒUR-D’OR, NOUS IDOLE DES TEMPÊTES, TE SALUONS. » Lorie décrocha son regard de celui de Teilo. « Puis un être de l’eau a crié LORIE FLEURY CHAMPIONNE DE BEAUXBATONS et un énorme étendard de Beauxbâtons est apparu et les Brésiliens ont applaudi. Puis il s’est répété la même chose pour les autres champions, il y avait un prince et un mage blanc. »
« Attends ! Tu as vu un mage blanc ? Enfin autre que Delalande ? » Souffla Elina.
« Uhm-uhm fit Lorie qui se servit une coquille Saint-Jacques qui était revenue à table par la magie de maman Daroux. Nahele, le champion de Castelobruxo… À vrai dire, ce n’est pas le premier que je vois, mais c’était une très bonne surprise. Pensée l’observa avec attention. Amy, celle qui m’accompagne est la gouverneure des mages blancs des Amériques, puis il y a euh, Sekou, Soo-Yun, Tim. Commença à lister Lorie, vous en connaissez-vous aussi, puisque vous en avez une devant les yeux. » Lorie mit un doigt contre ses lèvres comme dans la confession d'un secret, puis fit un petit clin d’œil. Pensée était ébahis, Elina aussi.
Lorie s’en amusa et continua de conter ce qu’elle avait pu voir là-bas. Offrant comme elle pouvait toutes les réponses aux questions des Daroux, que ce soit pour Suzanne, Fabrice, Ariane, ses sœurs, Robin et les parents Daroux.
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