Drian Vaillant
7ᵉ année, Délégué, Ogme
Les cours de cette première journée de rentrée achevés, je me dirige d'un pas décidé vers le dispensaire, comme convenu un peu plus tôt avec le professeur de guérison. Après délégué - ou plutôt en même temps -, j'ai choisi de m'inscrire en tant qu'apprenti au dispensaire. J'ai bien entendu quelque chose derrière la tête, même plusieurs. La principale est de me trouver une couverture, quelque chose qui lèvera le moindre doute sur mon allégeance. Je ne sais pas encore ce que prévoit mes maîtres mais je n'attendrai évidemment pas de le savoir pour prendre mes précautions. Et quoi de mieux qu'un lieu où on soigne les gens ? Je sais que ça sera compliqué. Outre les potions, ce sont principalement des charmes que je devrai lancer, et je vais devoir faire preuve de patience et d'empathie - ou réussir à faire semblant tout du moins - envers les autres élèves. Une plaie. Mais je sais que cette stratégie est la bonne.
Je suis arrivé devant le bâtiment. Je lève la tête pour contempler les parois vitrées laissant entrevoir des centaines de plantes avant de me recentrer sur mon objectif. Du bout de ma baguette, je touche la poignée de la porte du dispensaire. Il ne faut pas plus de quelques secondes avant qu'une bouche ne s'y forme.
- Oui ?
- Bonjour madame Zitelli, Drian Vaillant, j'ai rendez-vous avec le professeur Yapara.
- Ah oui bien sûr, elle m'a prévenu, entrez, elle se trouve dans l'arrière-salle.
Je traverse l'anti-chambre remplie de plantes pour entrer dans la serre, discrètement. Même si les lits sont vides - encore heureux en ce tout début d'année -, je garde un silence religieux. C'est que l'atmosphère qui y règne invite à se faire le plus petit possible. Je continue d'avancer jusqu'à la porte menant à l'arrière-salle à laquelle je toque trois coups. Cette fois, pas de bouche qui se forme sur la poignet ni un œil au milieu de la porte, simplement la professeur qui ouvre et m'invite à entrer.
- Merci professeur, d'avoir accepter ma candidature, je dis respectueusement en entrant même si je n'ai pas la moindre idée de si elle s'est vue imposer ce choix ou non. Je sais que je ne suis pas votre meilleur élève dans cette matière mais je ferai de mon mieux pour accomplir mon travail ici.
Tahina Yapara
Professeure de Guérison
Bref, la guyanaise était d'une humeur assez morose en ce début d'année et seules les retrouvailles avec Daniel lui redonnaient un peu espoir sur l'ambiance à l'académie. Et aussi la surprise qu'elle avait vu avec Drian Vaillant. Sans être un mauvais élève en guérison, elle ne l'avait jamais senti passionné par sa matière. Ses notes étaient correctes mais il semblait lui manquer une chose essentielle selon elle : l'écoute. Toujours est-il qu'il semblait vouloir s'améliorer puisque, ayant atteint l'année nécessaire, il avait demandé à être apprenti au dispensaire. Une surprise donc mais une bonne surprise. Et justement, il était l'heure.
"Entrez Drian, asseyez-vous." commença-t-elle après lui avoir ouvert la porte. "Vous voulez boire quelque chose ?"
Pour sa part, elle avait besoin d'une bonne tasse de chocolat chaud bien fumant. Un petit rituel qu'elle s'octroyait quand la journée avait des allures un peu étranges comme ce jour-là. Elle y mettait même des guimauves quand elle avait besoin de se remonter le moral mais ça, c'était en toute fin de journée quand elle pouvait se reposer. Ce qui n'était pas le cas pour le moment.
"Bien, avant toute chose, il est important que vous sachiez que vos responsabilités augmenteront graduellement au cours de l'année mais que, pour le moment, vous ne ferez qu'assister Melle Zitelli ou moi-même. Bien évidemment, nous répondrons à toutes les questions que vous pouvez vous poser mais je vous demanderais de ne jamais les poser devant les patients. Simplement parce que ça peut parfois être source de stress pour eux et c'est ce que nous voulons éviter. Ensuite, les heures sont aménagées afin de vous permettre de faire vos devoirs et toute autre activité que vous souhaitez mais vous aurez parfois à venir plus souvent en fonction de la charge de travail. A tout moment, si vous ns vous en sortez plus, il ne faudra pas hésiter à m'en parler. Je sais que vos obligations de délégué vous prendre aussi beaucoup de temps, il faut donc faire attention à vous ménager. Le but n'est que vous deveniez vous-même un patient."
Elle prit alors une gorgée de sa boisson et s'installa confortablement dans son siège, tentant de sonder son élève comme elle l'avait déjà fait auparavant. Il semblait pourtant avoir en commun avec son oncle d'être indéchiffrable. Difficile de savoir ce qu'il se passait dans sa caboche mais ce n'était pas pour autant que Tahina abandonnerait l'idée.
"Avant d'aller plus loin, avez-vous des questions ?"
Drian Vaillant
7ᵉ année, Délégué, Ogme
Je prends le temps de m'assoir avant de répondre à la professeure. Je vais pour répondre par la négative quand je me rends compte que je suis desséchées. Quand est-ce que j'ai bu pour la dernière fois déjà ? A force de cogiter, j'en oublie mes besoins vitaux.
- Je veux bien un verre d'eau, merci.
Une fois tout installé, Madame Yapara entame son discours et je l'écoute sans broncher. De temps à autres, je hoche la tête pour signifier que j'ai bien intégrer l'information. Ne pas demander devant un patient pourquoi il a un bras en plus ? C'est bien noté ! Mon amusement intérieurement s'estompe nettement lorsque je commence à prendre la mesure de tout ce qui va m'attendre cette année. Les devoirs, mon rôle de délégué, des tâches de plus en plus prenantes en tant qu'apprenti de toute évidence et à ceci s'ajoute le club de duel, les entraînements de Quattequin que j'ai bien l'intention de suivre sans oublier les entrainements avec Subtil. A mesure que la liste se fait dans ma tête, je me demande si mon idée était si bien que ça. Encore heureux que je n'ai pas trop à m'occuper de ma petite amie ! Avec quelques potions revigorantes de temps à autres, je devrai m'en sortir...
Je prends moi aussi mon verre d'eau pour en boire une longue gorgée. L'ampleur de la tâche à accomplir me semble déjà titanesque. Mais je suis coriace non ? Et puis, si je suis sur tous les fronts, personne n'irait imaginer que j'ai le temps de me former aux arts obscurs. Non, je ne dois pas regretter, travailler au dispensaire est définitivement une bonne idée. Si je dois sacrifier quelque chose, ce sera ce fameux Quattequin.
- Oui j'en ai une. Vous dites que mon temps ici sera aménagé avec mes autres activités, mais pour que je puisse me rendre compte de ce qu'il me sera possible de faire cette année, à quelle fréquence souhaitez-vous que je vienne au minimum ?
Tahina Yapara
Professeure de Guérison
"A minima deux fois par semaine, a priori deux heures le mercredi, quatre le samedi ou le dimanche en fonction de vos autres activités."
C'était un emploi extrêmement prenant, ça allait même au-delà d'un travail pour la guérisseuse. Pour elle, c'était une vocation et elle n'imaginait pas un seul instant qu'il puisse en être autrement pour les autres. Elle était rigoureuse et extrêmement exigeante quand il s'agissait de soigner les autres mais ça, son élève le savait depuis le temps qu'il la côtoyait.
"A mon tour de vous poser une question. Jusque là, vous n'avez pas vraiment montrer de grand intérêt pour la guérison alors quelles sont vos motivations ?"
Bien sûr, il avait abordé rapidement le sujet dans sa lettre d'inscription mais la professeur voulait le jauger alors qu'il répondait à sa question. Et aussi mieux cerner ses attentes pour faire un programme en conséquence. Elle n'abordait forcément pas l'année de la même façon si, contre toute attente, il souhaitait vraiment être guérisseur à la sortie de l'académie. Alors que si son objectif était "juste" de s'améliorer, elle lui en demanderait un peu moins. Ou en tout cas, elle ne le mettrait pas sur les cas les plus difficiles et se contenterait de le laisser sur la bobologie. Enfin, du moins, sur des cas peu complexes.
Drian Vaillant
7ᵉ année, Délégué, Ogme
La guérisseuse ne plaisante pas. Deux heures le mercredi, quatre le samedi ou le dimanche ? C'est une grosse partie de mon temps libre qu'elle veut que je passe au dispensaire. Cumulé aux entrainements de duel et de Quattequin, le reste du temps me sera à peine suffisant pour réaliser la masse de devoirs à laquelle je m'attends cette année. Soit. S'il faut en passer par là, je m'y plierai.
- Très bien, je dis sans la moindre émotion.
Je pensai qu'on en avait fini des discussions et qu'elle rentrerait dans le vif du sujet, me présenter mes futurs tâches par exemple, mais elle préfère de toute évidence continuer à explorer mes motivations, pour se rassurer quant à son choix de me prendre comme apprenti peut-être ? Je n'ai pourtant pas grand chose à ajouter à ce que j'ai déjà mentionné dans ma lettre. Rien d'avouable en tout cas. Peut-être ne l'a t-elle tout simplement pas lu ? Je m'en vais donc la lui exposer très simplement mais avant ça, je me dois de rectifier une mauvaise interprétation de la situation, mon syndrome de l'excellence pointant le bout de son nez.
- J'ai de l'intérêt pour tous mes enseignements, professeur, je commence sur un ton posé, la guérison est une branche de la magie très utile et je ne veux pas la mettre de côté. Ce n'est juste pas celle qui me vient le plus naturellement. Ou plutôt, pour être plus exact, j'ai du mal à diagnostiquer les patients... pour ne pas dire que je m'en contrefous et que je n'ai aucune patience face à leur souffrance. Humains, je me sens étrangement obligé de rajouter en me remémorant le jeune dahu dans la forêt. Il est vrai que ma sensibilité face à la créature magique était tout autre et que j'ai à peine réfléchi en le soignant. Je souhaite surtout m'améliorer là-dessus, je dis avec une humilité un peu forcée qui ne m'est pas habituelle, et bien sûr m'améliorer dans la matière en général.
Je ne sais pas si je suis assez convainquant. Je ne pensai pas en arrivant ici que je devrai défendre à nouveau cette place d'apprenti. Mais la question ayant déjà été réfléchi en amont, et avec quelques précisions dont elle ne pourrait me tenir rigueur - tout le monde n'est pas dans l'écoute totale des autres, je ne suis pas un cas isolé - et que j'avoue en partie, j'espère que ça sera suffisant.
Tahina Yapara
Professeure de Guérison
"Très bien, puisque nous sommes tous les deux clairs sur les intentions pour cette année, passons à côté. Je vais vous expliquer ce que j'attends de vous pour mercredi prochain."
Et comme à chaque apprenti arrivant au dispensaire, il aurait à faire une tâche pas des plus intéressantes mais hautement importantes. Non seulement, ça leur rendait service à Melle Zitelli et elle mais ça permettrait aussi de se faire un avis très précis de sa motivation. Elle se leva donc et le guida au dispensaire, plus exactement là où se trouvaient les armoires qui contenaient les remèdes.
"Comme vous le voyez, c'est ici que nous conservons les remèdes qui soignent la plupart des maux que nous rencontrons au sein de l'académie. Vous devrez donc en faire l'inventaire afin de savoir ce qu'il pourrait nous manquer. Vous devrez aussi vous assurer de la "fraîcheur" de chacune des potions. Même si nous utilisons des sortilèges pour les maintenir le plus longtemps possible, certaines sont peut-être périmées. Charge à vous donc de faire un inventaire exhaustif. "
Une tâche importante donc qui permettrait aussi à son élève de réviser sa maîtrise des potions pour vérifier lesquelles étaient encore bonnes et lesquelles ne l'étaient plus. Il n'aurait certainement pas terminé en deux heures et poursuivrait donc le week-end suivant ce qui permettrait aussi de voir son organisation... alors que certaines potions seraient peut-être utilisées ou déplacées entre temps.
Drian Vaillant
7ᵉ année, Délégué, Ogme
Il semblerait que la guérisseuse ait eu son compte en discours et que je l'ai à priori convaincu. Je me lève à mon tour pour la suivre à travers le dispensaire jusqu'à plusieurs armoires remplies de fioles de toutes tailles, formes et couleurs. Bien que je n'ai pas l'habitude de ces lieux - je n'ai pas la malchance de tomber constamment malade -, je devine assez facilement de quoi il s'agit : le stock de potions. Sans nulle doute que certains ont déjà tenté de piocher en douce là-dedans, je ne vois pas de verrou ou quoique soit d'autres qui en défendent l'accès.
Madame Yapara confirme mes pensées et m'explique rapidement ma future première tâche. J'essaye de me convaincre que je pourrai y trouver un intérêt. Pour pouvoir savoir si les potions sont périmées, il me faudra réviser mes notes sur les couleurs, odeurs et textures de chacune. Ca ne me ferait pas de mal de revoir tout ça. Mais j'aurai nettement eu plus d'intérêt de les tester - sur quelqu'un d'autres que moi évidemment - afin d'en étudier les effets. L'exercice aurait pu être riche en découverte, et follement plus amusant. En douce... peut-être que je pourrai faire passer ça pour un accident ? Après tout, je suis en apprentissage, je peux me tromper. Je suis vraiment curieux de savoir quel effet pourrait avoir une potion Dhakira périmée mais je doute que j'aurai l'occasion de l'administrer. Je ne serai probablement pas chargé de m'occuper d'une amnésie. Allez, je trouverai bien quelque chose sur quoi me rabattre, qui ne mettra pas en porte-à-faux.
- J'ai compris, je dis sans dévoiler mes pensées. Quand souhaitez-vous que je commence ? Je questionne avec un sourire feignant à moitié d'être enjoué par la tâche qui m'attend.
Je balaye d'un regard les armoires et tente de faire le compte. Il y en a beaucoup. Vraiment beaucoup. Si je ne veux pas y passer des heures durant, il me faudra être bien organisé et réviser dès maintenant. Autant profiter que la masse de devoirs ne soit pas encore tombée et que les activités ne soient pas encore tout à fait lancer. Je pourrai même demander à Lorie de m'aider, je la sais particulièrement douée en guérison. Ca me donnera l'occasion de me rapprocher un peu d'elle. Je sens que toutes les occasions sont bonnes à prendre.
Tahina Yapara
Professeure de Guérison
"Eh bien, dès mercredi. C'est un travail important qui doit être fait au plus tôt et je ne vois aucune raison de ne pas commencer votre travail dès cette semaine. Vu qu'il ne s'agit pas de s'occuper de patients, vous pouvez venir à l'heure qui vous conviendra le mieux. Je vous demande seulement de nous prévenir, soit Melle Zitelli, soit moi de votre arrivée et, à votre départ, de nous donner la liste des potions qui sont périmées afin qu'on puisse les remplacer au plus vite."
Là aussi, le laisser maître de son planning était une façon pour Tahina de tester son envie et le sérieux qu'il voulait mettre dans son apprentissage. Evidemment, elle se garda bien de lui dire. Il était arrivé à un âge où il lui fallait se montrer de plus en plus autonome et comme il n'était pas encore question d'organiser l'équipe de guérison en fonction de patients, elle pouvait se permettre de le laisser libre, dans une certaine mesure bien sûr, de ce qu'il faisait. De toute façon, s'il mettait trop de temps à s'acquitter de son tâche, elle reprendrait la main afin que les patients n'en pâtissent pas. D'autant qu'elle tenait un livre des potions utilisées au fur et à mesure donc ça ne lui prendrait pas autant de temps qu'à lui.
"Si vous n'avez pas d'autres questions, on peut s'arrêter là pour ce soir et on se dit à mercredi."
Drian Vaillant
7ᵉ année, Délégué, Ogme
Je ne m'attendais pas à être de corvée si vite, j'aurai pourtant dû m'en douter à force de côtoyer ma maitresse de confrérie. Elle n'aime pas laisser les choses s'éterniser. Mon orbiplume à la main, je note scrupuleusement chaque potion que je vérifie en indiquant la date sur les étiquettes et si je les estime périmées ou non. Aucun risque de les vérifier deux fois comme ça. Quant aux périmées, je les regroupe en plus sur une étagère et en fait la liste sur un parchemin que j'ai déposé sur une table à proximité. Ce travail est aussi fastidieux que je le pensai, d'autant plus que j'ai à peine eu le temps de réviser - un peu hier, deux heures ce matin - et que je suis obligé de laisser plusieurs potions de côté, incapable de dire si elles doivent être détruites ou non. Celle-ci je me les garde pour samedi. Au vu du nombre d'armoires, même en connaissant tout, je n'aurai jamais pu finir en deux heures de toute manière.
- Voyons voir, je marmonne en me saisissant d'une énième fiole au contenu argenté. Ca fait déjà une heure que je suis là, mais c'est la première que je vois de ce genre. Potion Dhakira, je lis à voix haute.
Je ne la connais pas celle-ci, elle doit faire partie du programme de sixième ou septième année. Plus qu'à potasser mon manuel. Ce n'est habituellement pas en guérison que je prends de l'avance mais je ferai une exception cette année. J'inscris un point d'interrogation sur l'étiquette de la potion avant de la redéposer sur une étagère et de m'en saisir d'une autre. A peine je la débouche que son liquide remonte jusqu'à la surface et en sors. De surprise, je lâche immédiatement la fiole qui s'écrase au sol.
- Merde*, je dis en observant le contenu rependu et fumant parmi les morceaux de verre.
Je crois que pour celle-ci il n'y a pas de doute. J'ai eu de la chance de ne pas m'en mettre sur les doigts, je n'aurai surement pas apprécié le résultat. Je sors ma baguette et reforme la fiole intacte. Par contre, il va me falloir quelque chose pour nettoyer. Et quelque chose qui ne craindra pas le contenu qui a je ne sais quel effet une fois périmé. Il ne manquerait plus que ça soit corrosif. Je fouille en bas des armoires, sans succès, avant de me retourner et de tomber nez à nez avec le professeur Yapara. Elle ne pouvait pas plus mal tomber.
*Paroles prononcées en bulgare
Tahina Yapara
Professeure de Guérison
Autant dire que les mercredis du mois de septembre étaient bien chargés, même si elle ne dispensait aucun cours, comme tous ses collègues. Elle avait quand même profité qu'il fasse beau pour une petite balade matinale qui lui avait fait un grand bien puis, après une bonne douche, avait pris le temps qu'un copieux petit déjeuner avant de démarrer sa journée. Elle n'était donc pas arrivée de bonne heure mais elle savait Melle Zitelli parfaitement capable de gérer en son absence. D'autant qu'elle était beaucoup plus douée qu'elle pour écouter les pleurs des élèves perdus loin de tout ce qu'ils avaient connus jusque là. La plupart était surexcité à l'idée d'apprendre la magie mais n'avait pas anticipé la difficulté de se retrouver loin de papa et maman. Or, c'était bien connu, la guyanaise n'était pas la patience incarnée.
Tout étant sous contrôle, elle était donc dans son bureau quand son nouvel apprenti avait signalé son arrivée avant de se mettre au travail. Tahina, quant à elle, faisait l'inventaire des plantes, comme à chaque rentrée. Elle termina donc ce qu'elle avait entrepris avant d'aller voir comment le jeune Vaillant s'en sortait... au moment où elle entendit le bruit caractéristique d'une fiole se brisant sur les dalles. Le juron qui s'ensuivit, dans une langue qu'elle ne comprenait pas, lui indiqua la provenance et elle resta un instant à l'écart pour voir ce qu'allait faire son délégué. Une fois qu'il eut réparé la fiole, elle s'avança.
"Vous trouverez ce dont vous avez besoin dans le tiroir, derrière vous, sur votre gauche."
Elle ne fit aucun autre commentaire mais regarda le liquide répandu sur le sol afin d'en connaître la provenance. Elle s'assura ensuite que son élève n'avait pas été touché par le liquide, même si elle s'en doutait vu qu'il ne semblait pas gémir de douleur. Eh bien, ça arrivait à tout le monde de briser une fiole mais elle ne s'était pas attendu à ce que ça arrive si vite. Elle finit par reprendre, avant qu'il nettoie son erreur :
"Comment se passe votre premier jour ? Avez-vous des questions, des remarques ?"
Drian Vaillant
7ᵉ année, Délégué, Ogme
La professeur de guérison ne fait pas de remarque sur le liquide répandu au sol et se contente de m'indiquer le lieu où je trouverai de quoi nettoyer. Enfin, c'est ce que je suppose, même si rien n'est dit explicitement, ce dont j'ai besoin est assez évident, pas besoin d'être un auror pour le deviner. En suivant ses instructions, je récupère rapidement le nécessaire avant de lui faire face à nouveau. Pas question que je me mette à quatre pattes devant elle pour faire disparaître la potion, j'attendrai qu'elle soit repartie. C'est suffisamment humiliant comme ça, je viens à peine de commencer et elle me retrouve déjà avec une fiole brisée. Je ressens le besoin de m'expliquer, je ne peux lui laisser imaginer que je suis maladroit ou négligeant. Je me suis tout de même fait attaquer par une potion ! Il en va de ma fierté et sa question tombe à pic.
- Tout va bien, je ne m'attendais juste pas à ce que le contenu des fioles essaye de s'échapper. Navré, je ferai plus attention pour les suivantes.
Je fais un pas dans la direction de la table pour y chercher mon parchemin en veillant à ne pas marcher dans la flaque de potion non identifiée puis je le tends à la sorcière.
- J'y ai consigné toutes les potions périmées que j'ai mise de côté sur cette étagère, je lui dis en pointant la plus à gauche. J'ai également indiqué sur les étiquettes les dates de vérification et si elles sont périmées ou non, comme ça il n'y a pas de risque de confusion. Est-ce que cette façon de faire vous convient professeur ? Je demande respectueusement.
Je ne mentionne pas celles où j'ai un doute, de toute façon, je le lèverai rapidement lors de mon prochain passage. Je n'ai pas envie qu'elle me fasse un cours magistrale maintenant si jamais mes lacunes la titillent, j'ai assez farci ma tête avec de la guérison aujourd'hui. Je n'ai d'ailleurs pas encore fini mon nombre d'heures alors plus vite elle repartirait, plus vite je pourrai avancer. Pas la peine de lui tendre une perche pour la faire rester. Je préfère être seul.
Tahina Yapara
Professeure de Guérison
"Je vous conseille de commencer d'abord par identifier les potions que vous connaissez sans ouvrir les fioles et à laisser de côté les autres. Je pourrais ensuite vous aider pour celles qui vous restent mystérieuses."
Après tout, s'il n'ouvrait pas les fioles, ça limiterait les risques "d'attaque". Et surtout, ça lui prendrait le mois complet si jamais il ouvrait les fioles une à une. Et bien qu'elle ne lui ai pas mis d'objectifs, elle espérait vraiment qu'il pourrait s'acquitter de sa tâche assez rapidement pour pouvoir passer à autre chose. Et aussi, bien évidemment, pour qu'elle ait le résultat de l'inventaire qu'il faisait. Elle prit ensuite le parchemin qu'il lui tendait et jeta un œil dessus. Elle aurait le temps plus tard de faire le nécessaire pour renouveler les stocks mais, pour l'heure, la rapide analyse lui permettait de se faire une idée du travail de l'adolescent.
"La synthèse est claire, ça me va."
Pour autant, elle n'avait pas l'intention de partir de suite. Elle voulait voir comment le jeune homme s'y prenait. Ne serait-ce parce qu'il était avant tout là pour apprendre et, pour ça, il fallait d'abord qu'elle voit comment il travaillait.
"Montrez-moi comment vous procédez."
Elle ne parla pas du liquide répandu au sol mais ne l'oubliait pas pour autant. Qu'allait donc faire son élève en premier ? Inspecter une nouvelle fiole ou nettoyer d'abord ?
Drian Vaillant
7ᵉ année, Délégué, Ogme
Je me retiens de faire remarquer que celle répandue au sol, je la connaissais. Je ne suis pas certain que cela aille dans mon sens alors autant m'abstenir. Pas plus que de lui dire que je n'ai pas envie de son aide d'ailleurs même si ça me brule les lèvres. Je suis en sixième année, pas en première, je peux très bien me débrouiller par moi-même. La guérison, ce n'est pas si compliqué que ça, il suffit juste de potasser un peu et de suivre des instructions. Avec un peu de lecture, rien ne me sera mystérieux, j'en suis convaincu. Enfin, ma synthèse lui convient, je vais donc pouvoir m'y remettre tranquillement.
Mais, pourquoi ne part elle pas ? J'ai rapidement ma réponse et malgré mes entraînements, ma mâchoire se crispe une fraction de seconde. Ce que cette maîtresse de confrérie peut être agaçante. Je n'ai le choix de me la coltiner encore un temps, j'espère le plus court possible. Alors que je m'apprête à pivoter vers les armoires, mes yeux tombent à nouveau sur la flaque de potion. Je ne peux pas laisser ça comme ça, je vais finir par marcher dedans en me concentrant sur autre chose. Et le regard que l'adulte me lance me donne l'impression de subir un test. Ce que je ne voulais absolument pas faire, à savoir me mettre par terre à ses pieds, me semble maintenant inévitable. Je me demande si elle ne le fait pas exprès de m'imposer sa présence pile dans cette situation. D'autant plus qu'elle pourrait faire disparaître la potion d'un coup de baguette si elle le voulait, j'ai déjà vu Monsieur Figueiredo le faire.
- Si vous permettez professeur, je vais nettoyer avant, je dis d'un ton neutre.
Le visage tout aussi neutre, je m'accroupis pour éponger la potion avec le torchon qui doit probablement être imprégné d'un sortilège pour avaler le tout aussi vite sans laisser la moindre trace, en évitant soigneusement de regarder l'adulte qui me surplombe. J'ai la désagréable impression de retrouver avec mon oncle qui m'écrase de son regard et je déteste ça. Heureusement que la professeur est suffisamment jeune pour ne pas avoir de canne, l'analogie s'arrête donc là.
Une fois le sol à nouveau propre, je me redresse et me remets tout de suite à la tâche sans faire le moindre commentaire. Plus vite je me reconcentre, plus vite j'oublierai cet épisode humiliant. En silence, je récupère une fiole d'une potion que je connais, observe la couleur par transparence, la penche pour en éprouver la texture. Normalement, je l'aurai débouché pour confirmer à l'odeur mais comme Madame Yapara m'a spécifiquement dit de ne pas le faire, je m'abstiens. Comme je ne vois pas d'anomalie, j'inscris sur son étiquette la date de vérification et la repose à sa place. Je réitère la manœuvre sans un mot et place la suivante qui a texture plus gélatineuse qu'elle ne devrait sur l'étagère des périmés après l'avoir annoté. Je n'ai pas besoin de tout expliquer j'imagine qu'elle comprendra d'elle-même comment je fonctionne. Ou elle me posera peut-être des questions. Faite que ça soit rapide dans tous les cas.
Tahina Yapara
Professeure de Guérison
Elle resta quelques minutes à regarder son élève procéder, histoire de s'assurer que ses gestes étaient suffisamment assurés. Sa méthode n'était pas forcément ce qu'elle aurait choisi mais ça fonctionnait et il était important qu'il se fasse sa propre expérience. Elle allait lui poser des questions pour mieux cerner son travail quand, du coin de l’œil, elle vit un deuxième année entrer dans le dispensaire avec le visage sacrément tuméfier. Son assistante étant occupée par ailleurs, la professeur laissa son délégué tout seul pour aller à la rencontre de l'enfant. Elle l'ausculta rapidement, s'assurant qu'il n'y avait rien de grave, le rassura et l'installa sur un lit avant de se tourner vers son nouvel apprenti :
"M. Vaillant, souhaitez faire une pause dans votre travail actuel pour vous occuper de ce jeune homme ?"
Après tout, elle avait parfaitement conscience du côté rébarbatif de la tâche et l'objectif n'était pas non plus de le rebuter. Si l'inventaire était nécessaire, rien n'empêchait de faire une pause pour reprendre plus tard. Et là, le patient n'était pas dans un état critique... il n'avait rien que Drian ne saurait gérer s'il le souhaitait alors autant lui en donner l'opportunité.
Drian Vaillant
7ᵉ année, Délégué, Ogme
Je réitère mes gestes, continuant inlassablement mon rituel jusqu'à ce que je ne sente plus son regard sur moi. Etonné, je jette un coup d'œil par-dessus mon épaule et la vois s'éloigner vers un élève. Je m'attendais à des questions toutes plus ennuyantes les uns que les autres, ce gamin tombe à pic. J'essaierai de penser à la remercier pour m'avoir éviter ça. Non... quand même pas, il faut bien qu'il serve à autre chose qu'à m'ennuyer lors de mes rondes.
Je continue mon travail, espérant avancer suffisamment pour en être débarrassé au plus tôt lorsque la voix de la guérisseuse m'en tire à nouveau. Je la regarde, un peu étonné, avant de sourire.
- Avec plaisir professeur !
Je dépose la fiole que je tiens encore en main avant de rejoindre le lit où est assis l'élève. Ca m'emmerde, mais je suis là pour ça. C'est même bien plus ma fonction que de trier des potions alors je dois me montrer enthousiaste ou ma couverture partira en fumée. Je remercie l'occlumencie et les entraînements de Subtil pour me permettre de porter ce masque sans accroc.
- Je m'appelle Drian Vaillant et je vais m'occuper de toi. Comment t'appelles-tu ? Je demande avec un sourire encourageant, bien conscient que chacun de mes morts et de mes gestes est épié. J'écoute sa réponse en observant son visage tuméfié. Wuah, on dirait qu'il s'est fait massacré par un cognard. Ce qu'il me confirme lorsque je lui demande ce qu'il lui est arrivé. J'espère qu'il sera pris dans une équipe - et pas dans la mienne - ça fera une distraction aux balles furieuses pendant les matchs puisqu'il semble les attirer. C'est un miracle qu'il n'ait rien de cassé.
- Ne t'inquiètes pas, je vais te soigner en un rien de temps et tu ne sentiras plus rien. Si tu es d'accord, je vais t'appliquer un onguent de Premiers Soins.
J'attends son assentiment avant d'aller chercher dans l'armoire ce dont j'ai besoin. Il est certain que si je n'avais pas Madame Yapara derrière moi en train d'épier, les choses auraient été un peu plus expéditives. La guérison, c'est surtout utile pour soi-même, voilà pourquoi je m'y suis appliqué le plus possible. Je me passerai bien de toute cette mièvrerie. Plus tard. Pour l'instant, mon patient est roi et j'y vais avec une rare douceur et patience, comme de celles que je cultive pour amadouer Lorie.
- Et voilà, c'est terminé, je dis une fois que je lui est recouvert ses hématomes avec de l'onguent, m'adressant autant à lui qu'à ma maitresse de confrérie.
Tahina Yapara
Professeure de Guérison
Elle resta donc en rentrant, regardant ses faits et gestes, ainsi que sa façon de rassurer son camarade. Il appliqua à la lettre les instructions qu'il avait apprises en première année, demandant à son patient ce qui lui était arrivé afin de pouvoir poster un diagnostic plus précis. Il prit même le temps de le rassurer. En bref, c'était un bon premier contact avec les soins prodigués à un enfant. Il décida du traitement et l'appliqua même avec attention. Si la maîtresse de confrérie avait une seule petite chose pour chipoter, elle aurait peut-être elle-même lancé un "Assurdiato" avant l'entretien afin d'assurer un peu d'intimité un jeune Dagda. Elle se garda pourtant bien d'en parler vu que ce n'était pas absolument nécessaire dans ce cas précis et surtout pour garder sa confiance en lui à Drian. Il serait toujours temps d'aborder le sujet plus tard, si un cas plus difficile venait à se présenter.
"Treès bien, M. Vaillant. Je vous laisse poursuivre votre travail avec votre patient et votre inventaire. Vous en aurez, ensuite, fini pour aujourd'hui. Si vous avez des questions, n'hésitez pas bien sûr sinon, on se revoit samedi en milieu d'après midi."
Il ne fallait, après tout, pas oublier que l'adolescent avait aussi à travailler ses devoirs et puis certainement qu'il avait des loisirs ou d'autres choses à faire en dehors du dispensaire. Sans parler de son "travail" de délégué qui, en début d'année, était forcément un peu plus conséquent avec touts ces nouveaux arrivants qui ne connaissaient pas encore les règles. Être apprenti ne voulait pas dire être corvéable à merci et c'était déjà pas mal pour démarrer l'année. Sans compter que la guyanaise avait, de son côté, bien d'autres choses à faire et qu'avoir un œil sur Drian n'aidait pas à faire avancer son travail. Elle aimait profiter des mercredis pour avancer sur les préparatifs de ses cours et comme, en début d'année, il n'y avait pas encore trop de bobologie ou de maladie, c'était le moment parfait pour ça. Elle pourrait même peut-être aller faire un tour en fin de journée pour se dégourdir les "pattes", si tout allait bien.
- Spoiler:
- On peut faire un saut dans le temps si tu le souhaites. Sinon, on met fin au RP ?
Drian Vaillant
7ᵉ année, Délégué, Ogme
Je hoche la tête aux directives de la guérisseuse et retourne à ma première longue et fastidieuse tache tandis qu'elle s'éloigne vers d'autres sujets probablement plus urgents. Enfin débarrassé d'elle ! Maintenant qu'elle s'est assurée que je savais autant soigner un petit bobo que trier des potions, elle devrait normalement me laisser tranquille pour un moment. Je reprends donc mon inspection des fioles qui durerait encore le samedi suivant et le mercredi encore d'après. A croire que les deux femmes ne s'occupaient jamais de ça tant il y avait à faire.
Le reste de l'année, mon rôle en tant qu'apprenti s'avéra un poil plus intéressant, avec des cas un peu plus atypiques ou difficiles. Dans ces moments là, je me contentai d'assister Mademoiselle Zitelli ou le professeur Yapara, observant ce qu'il y avait à observer, apprenant ce qu'il y avait à apprendre. Je fus même réquisitionné bien plus souvent que prévu, avec d'autres élèves en guérison, pour faire face à l'épidémie d'éclabouille qui a eu lieu en février. Pas moins d'une cinquantaine d'élèves étaient passés au dispensaire sur un temps compressé d'une poignée de jours à peine. Je n'aurai jamais cru voir un jour autant de pustules. Il y en avait partout, une horreur.
Mon apprentissage au sein du dispensaire s'arrêta toutefois abruptement en mars, lorsque le directeur Delalande y fut pris en charge. Les aller-venues étaient devenues bien plus strictes mais surtout, je ne pouvais pas supporter d'être aussi proche de l'homme que j'avais moi-même mis dans cet état. Prétextant une montagne de devoirs et un emploi du temps devenu incompatible avec ma présence au dispensaire, je mis ainsi définitivement un terme à cette couverture factice. Je n'en avais plus besoin maintenant, bientôt l'ordre des choses changerait, tout du moins, c'était la promesse que m'avait fait Sa Seigneurie.
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